Comme une réminiscence نذكر و ما نذكرش / TGM Gallery 2025

 

“Comme une réminiscence”(نذكر وما نذكرش) est une plongée intime dans les méandres de la mémoire, à la frontière du visible et de l’invisible. Cette série de 21 dessins réalisés au crayon aquarelle rouge revisite mes photos de famille, en particulier celles de mon enfance, et tente de raviver les souvenirs flous de cette période où l’on est trop jeune pour se souvenir pleinement. Je me suis intéressée aux photographies qui, à l’origine, n’avaient aucune intention artistique, mais qui reflètent une époque et une esthétique commune. Ces images familières, presque universelles, ont été capturées dans un but purement personnel, mais elles finissent par devenir des témoins d’une mémoire collective. En les revisitant, je m’inscris dans une réflexion sur ce que ces images disent de nous, de notre histoire commune, et de notre manière de nous souvenir. Née en France mais ayant grandi en Tunisie, je porte une mémoire fragmentée, comme une mosaïque d’instants à reconstituer. Cette quête a été inspirée par deux paroles marquantes. Christian Boltanski, dans sa réflexion sur le passage du temps, parle de l’enfance comme une première mort que nous portons en nous : « On meurt constamment… Une partie de mon activité a consisté à parler de cet enfant mort. » Ces mots m’ont confrontée à l’idée de cet “enfant disparu” que je cherche à retrouver à travers mes dessins. Puis, un témoignage poignant d’un enfant palestinien, qui à la question « Que veux-tu devenir quand tu seras grand ? » a répondu : « Nous, les Palestiniens, nous ne grandissons pas » (احنا الفلسطينين ما بنكبرش). Ces mots, empreints d’une douleur indicible, m’ont secouée et interrogée : qu’est-ce que cela signifie d’avoir ou de ne pas avoir une enfance ? Dans cette série, je réfléchis à la mémoire collective et individuelle, au destin, à l’enfance, et à la chance d’avoir été entourée d’amour et de douceur dans une famille aimante. Chaque dessin tente de convoquer ces fragments de vie, comme un dialogue entre le souvenir, l’oubli, et l’imaginaire. C’est une recherche, non pour figer le passé, mais pour le réinventer, avec une conscience aiguë que tout le monde ne connaît pas une enfance heureuse. En dessinant, je ne me souviens pas seulement. J’invente.